Une riposte rapide permet de contenir l’épidémie d’hépatite E à l’Est du Tchad

Une riposte rapide permet de contenir l’épidémie d’hépatite E à l’Est du Tchad

Adré – « Au début, je faisais un peu de fièvre et j’avais des courbatures. J’ai pensé que ce n’était rien de grave, mais la nuit, je n’arrivais pas à bien dormir et le matin, j’avais des difficultés à me déplacer. J’avais très mal aux articulations et je ne pouvais pas marcher même sur une courte distance », raconte Ousman*, la trentaine, réfugié à Adré. « J’avais très mal au ventre et je vomissais beaucoup. »

Ousman ne le savait pas encore mais il souffrait de l’hépatite E. L’hépatite E est une inflammation du foie provoquée par un virus excrété dans les selles des personnes infectées et qui pénètre dans l’organisme humain à travers les intestins. Il est transmis principalement par l’eau de boisson contaminée. Un manque d’hygiène et d’assainissement est généralement la cause de l’hépatite E.

Depuis le début de l’année 2024, une épidémie d’hépatite E a été déclarée dans l’Est du Tchad notamment dans les camps de réfugiés. A la date du 9 juin, 2 894 cas ont été rapportés dans sept camps et sites de réfugiés répartis dans deux provinces notamment le Ouaddaï et le Sila. Onze décès ont été enregistrés pour un taux de létalité de 0,4%. Au cours de la période de pic, du 19 au 25 févier 2024, plus de 350 cas ont été notifiés.

Dès l’apparition des premiers cas en janvier 2024, des échantillons ont été testés positifs pour l’hépatite E par le test de diagnostic rapide (TDR) dans le pays avant d’être confirmés au test PCR par l’Institut Pasteur de Dakar, au Sénégal. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) ayant apporté un appui au système de transport des échantillons du site de prélèvement au laboratoire national ainsi que leur expédition à Dakar.

A la confirmation des cas d’hépatite E, les autorités sanitaires, soutenues par des partenaires dont l’OMS, ont rapidement mis en place un plan de riposte permettant de contenir l’épidémie. L’Organisation a déployé une équipe multidisciplinaire à Adré pour soutenir la mise en place des activités de riposte à l’épidémie.

L’OMS a équipé les districts d’Adré et de Hadjer Hadid en boîtes triple emballage pour le transport sûr et l’expédition des échantillons. En plus, elle a renforcé ses activités de surveillance. « L’OMS a appuyé l’adaptation des directives et outils de gestion de l’épidémie. Etant donné que le traitement est symptomatique, les kits de médicaments que nous avons mis à la disposition des districts ont contribué à la prise en charge des cas », a indiqué le Dr Omar Gollom, Point focal de l’OMS à Adré.

L’Organisation a aussi appuyé la formation de 42 relais communautaires sur la communication de risque et l’engagement communautaire ainsi que sur la recherche active des cas. Les supervisions formatives ont été intensifiées dans tous les centres de prise en charge des districts concernés.

Abdel-Aziz Djidou est infirmier à l’hôpital de district d’Adré depuis 4 ans. Avec les épidémies qui se sont succédées depuis l’arrivée des réfugiés, il a plusieurs fois été formé sur la prise en charge adéquate des cas. Il en va de même pour l’épidémie d’hépatite E. « Les supervisions formatives constituent une grande opportunité pour améliorer mes compétences. J’en ai tellement appris ces derniers mois », confie-t-il. Abdel-Aziz applique à la lettre les notions apprises. « Pour l’hépatite E, nous conseillons aux patients de s’isoler et de boire beaucoup d’eau. Ils ne doivent pas prendre des aliments trop chauds, ni du paracétamol. C’est contre-indiqué », ajoute l’infirmier. « Aussi, nous mettons un accent particulier sur l’hygiène, l’assainissement et la consommation d’eau potable. »

Avec l’appui des autres partenaires, les infrastructures d’hygiène et d’assainissement ont été renforcées par la réalisation de forage, la construction de latrines supplémentaires et la vidange de celles qui sont pleines ainsi que la désinfection des lieux à risque comme les marchés et les points d’eaux.

« Avec toutes les initiatives de riposte mises en place, les cas continuent de régresser et la situation sanitaire dans le district d’Adré est stable », rassure le Dr Mahamoud Adam Ahmat, le Médecin chef de district d’Adré. Dans la semaine du 3 au 9 juin, seuls 12 nouveaux cas ont été notifiés dont 6 dans son district. « C’est un soulagement pour nous de voir les cas diminuer au fil des jours. Ceci a été possible grâce aux différentes mesures que sont la recherche active des cas, les sensibilisations sur l’hygiène, l’assainissement et la non-défécation à l’air libre, le traitement de l’eau avec le chlore », a relevé le Dr Mahamat. « Notre district est l’épicentre de cette crise des réfugiés. Avec l’appui de partenaires, nous sommes arrivés à contenir les épidémies que nous avons connues dans le district. Ce sera aussi le cas de l’hépatite E », avance-t-il confiant.

Depuis avril 2023, l’Est du Tchad accueille plus de 700 000 personnes fuyant le conflit armé au Soudan. Avec ce déplacement massif, les structures de santé sont mises sous pression. Plusieurs épidémies ont été déclarées dans la région et contenues avec l’appui de l’OMS. Il s’agit notamment des épidémies de dengue, de rougeole, de polio, de fièvre jaune ou encore d’hépatite E. Le risque d’épidémie de choléra demeure, surtout durant la saison pluvieuse qui court de juillet à septembre.

L’Organisation soutient les investigations pour toutes les notifications qui sont faites et le convoyage des prélèvements vers les laboratoires pour le dépistage. « Nous avons prépositionné des kits pour faciliter la réponse à ces différentes épidémies qui menacent les provinces de l’Est », a indiqué le Dr Eric Didier N’dri, Coordinateur du cluster Santé au bureau de l’OMS au Tchad.

En l’absence de traitement antiviral contre l’hépatite E, la prise en charge est symptomatique. Deux semaines après son traitement, Ousman se porte mieux. « Maintenant, ça va. Juste que je n’ai pas retrouvé totalement l’appétit mais c’est très loin de ce que j’avais vécu », assure-t-il. « Je fais maintenant plus attention à l’eau que je bois. Je me lave aussi régulièrement les mains. »

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Kayi Lawson

Chargée de communication 
Bureau régional pour l'Afrique
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