Agir sur les multiples déterminants pour trouver un remède efficace à la situation sanitaire précaire de la région de Matam
Au cours de son séjour dans la région de Matam, du 19 au 20 juin 2012, le ministre de la Santé et de l’Action sociale, le Pr Awa Marie Coll Seck, en plus du lancement de la réponse nationale à la crise nutritionnelle qu’elle a présidé, a visité l’hôpital municipal de Ourossogui et les chantiers de Hôpital régional et de la Région médicale.
Elle a également présidé un Comité régional de développement (CRD) qui a regroupé les autorités administratives, sanitaires, des Directeurs et chefs de services du département de la santé, d’autres départements ministériels, les élus locaux, le Représentant Résident de l’OMS, le Représentant Résident de l’UNICEF, les représentants du PAM, de l’UNFPA, des populations, des syndicats et d’ONG.
L’exposé fait par le médecin-chef de la région en guise d’introduction aux travaux du CRD décrit une situation sanitaire précaire liée à plusieurs déterminants. En effet, ancien département de la région de Saint-Louis, Matam a été érigé en région en 2002.
Peuplée de 582 000 habitants, elle est la deuxième région la plus étendue du Sénégal. Elle compte trois départements dont chacun s’étend sur une superficie supérieure à celle des régions de Diourbel et Dakar réunies. Aussi, l’étude sur la situation économique et sociale de la région de Matam réalisée en 2007 par l’Agence nationale de le Statistique et de la Démographie conclue-t-elle que « l’étendue de la région et de ses entités administratives, jumelée à un enclavement interne et externe, pose de réels problèmes de liaison, d’encadrement administratif et technique, et de sécurité des populations ».
Sur le plan sanitaire, les populations des 03 départements sont couvertes par 04 districts sanitaires dont celui de Ranéro-Ferlo qui s’étend à lui seul sur 51% du territoire régional. La région de Matam est aussi confrontée à l’insuffisance des infrastructures sociales de base, des personnels de santé, notamment des spécialistes, à la persistance de certaines croyances et valeurs socioculturelles, à la faiblesse du pouvoir d’achat des populations et au phénomène de la transhumance.
Plusieurs contraintes ont également été soulevées par le médecin-chef de région. Il s’agit de l’absence de médecin adjoint au niveau des districts sanitaires, de médecins spécialistes, de la fuite du personnel de santé affecté, de la vétusté de la chaîne de froid, de la fermeture de postes de santé faute de personnels, de l’irrégularité de la supervision, de l’insuffisance du personnel enseignant et du matériel pédagogique au niveau du Centre régional de formation.
Parmi les doléances exprimées, on retient la construction et l’équipement du centre de santé du nouveau district sanitaire de Thilogne, l’ouverture du bloc SONU du centre de santé de Kanel et l’affection d’un gynécologue, la mobilisation des fonds de dotation des collectivités locales pour améliorer le fonctionnement des structures de santé, l’accélération de la finalisation des travaux de l’hôpital régional. D’un coût de 5 milliards 500 millions de FCFA, la construction et l’équipement de cette infrastructure sont co-financés par l’Etat du Sénégal et la Banque africaine de développement. Il sera doté d’un groupe électrogène de 500 KWA et d’une station d’épuration des eaux usées qui répond aux normes environnementales.
A côté de toutes ces contraintes, la région de Matam dispose d’opportunités tels que l’appui de partenaires techniques et financiers, la présence d’un réseau dense d’acteurs non étatiques et de radios communautaires. Les travailleurs émigrés contribuent également de façon substantielle à la prise en charge de la construction d’infrastructures sanitaires, des salaires de personnels de santé et des dépenses de santé de leurs familles.
Intervenant au cours des discussions, le Représentant de l’OMS, le Dr Alimata Jeanne Diarra-Nama, s’est réjouie, au nom des partenaires au développement du secteur santé, d’avoir participé à la visite du ministre de la Santé dans la région de Matam, ce qui lui a permis de recueillir la perception du fonctionnement du système de santé et des performances des programmes de santé par les acteurs de la santé et les populations.
Le Représentant de l’OMS a assuré le ministre de la Santé de l’assistance technique de l’OMS à l’amélioration du fonctionnement du système de santé de la région et souhaité la mise en place d’un système de fidélisation des personnels de santé affectés dans la zone afin que la population puisse bénéficier en permanence de soins de qualité.
Matam est d’ailleurs l’une des régions ciblée pour bénéficier du Programme commun des Nations Unies UNDAF.
Elle a plaidé pour que la question de la situation nutritionnelle des enfants ne soit pas seulement liée à la pénurie alimentaire mais que des facteurs déterminants, telle que la faiblesse de la couverture vaccinale contre la rougeole, soient pris en compte dans la recherche de solutions. Le Dr Diarra-Nama a, enfin, réaffirmé les préoccupations des partenaires au développement par rapport à la poursuite de la rétention des données sanitaires par les personnels de santé membres des deux principaux syndicats du secteur santé.
Au terme des discussions, le ministre de la Santé et de l’Action sociale a déclaré « qu’en plus des mesures classiques qui seront prises, il est aujourd’hui impératif d’agir sur les déterminants de la santé si l’on veut éviter de perpétuer la situation de région défavorisée sur le plan sanitaire que vit la région de Matam ».
Cette situation est illustrée par la faiblesse de la plupart des indicateurs : 1,3% de taux de recrutement pour les méthodes contraceptives par an, alors que les besoins non satisfaits sont de 32%, faible taux de PTME de 44%, faiblesse du taux de dépistage et de guérison de la tuberculose, 25% seulement d’enfants complètement vaccinés, etc.
C’est pourquoi, le Pr Awa Marie Coll Seck a encouragé la mise en oeuvre de la multisectorialité, de l’approche communautaire et le renforcement de la décentralisation afin de favoriser la recherche de solutions locales à certains problèmes, sous le leadership des autorités administratives et sanitaires, des responsable de collectivités locales, des leaders communautaires et de populations. Parmi les autres pistes de solution proposées par le ministre de la santé, figurent la prise en charge intégrée des patients, compte tenu de l’enclavement qui rend difficile le déplacement des populations et les stratégies avancées pour faire face à l’insuffisance des structures de santé.
Et le ministre de la Santé d’ajouter que la région de Matam est prioritaire pour ce qui est de la réalisation de l’objectif de la couverture universelle en matière de santé défini par le Président de la République, d’autant que la mutualité est très peu développée dans la zone. Le Pr Awa Marie Coll Seck a donné son accord pour la révision du protocole de dépistage des cas de malnutrition actuellement en vigueur pour faire passer la périodicité de 03 à 01 mois d’intervalle afin d’accélérer l’identification et la prise en charge d’un plus grand nombre d’enfants en cette période de crise nutritionnelle.
Le plaidoyer en faveur de la gratuité de la prise en charge des enfants atteint de malnutrition sévère aigue sera également poursuivi pour éviter que le coût financier soit un obstacle au recours aux soins pour les familles. Le ministre de la Santé a enfin demandé à toutes les régions médicales de suivre l’exemple de Matam qui procède chaque semaine à la notification des cas de malnutrition dépistés.
Agir sur les multiples déterminants pour trouver un remède efficace à la situation sanitaire Matam