Les chefs religieux se joignent au combat du COVID-19 en Afrique

Les chefs religieux se joignent au combat du COVID-19 en Afrique

Abidjan/Nairobi – « Vous ne pouvez prier que si vous êtes en vie », déclare Abdallah Cissé Djiguiba, l'un des grands imams de Côte d'Ivoire. Plusieurs pays africains ont interdit les rassemblements et verrouillé les villes et villages pour empêcher la propagation du COVID-19. Les lieux de culte étant fermés, les plateformes virtuelles ne se contentent pas de relier les églises et les mosquées à leur congrégation, mais offrent aussi un espace pour transmettre des messages de santé et de sécurité sur le virus.

En Côte d'Ivoire, les rassemblements ont été interdits et les déplacements restreints le 16 mars. Deux jours plus tard, le Conseil des imams du pays a fermé les mosquées, une mesure qui, selon l'imam Cissé, âgé de 62 ans, n'a pas été sans mal. Les prières du vendredi et les grands événements religieux attirent jusqu'à 6000 fidèles à la mosquée de Salam, à Abidjan, la capitale commerciale de la Côte d'Ivoire, où il dirige des sermons. « Nous avons compris que nous devons préserver des vies. La prière à la maison a aussi son sens et son importance », note-t-il.

« La décision de fermer les mosquées a été une énorme surprise pour de nombreux fidèles. C'est une perturbation importante du mode de vie et des habitudes des gens et c'est une mesure qui provoque un changement de comportement », déclare l'imam qui participe régulièrement aux campagnes d'éducation du gouvernement en matière de santé publique : il apparaît à la télévision et parle à la radio à propos de la sécurité face au COVID-19. « En Afrique, il est difficile de dire aux gens d'arrêter de se serrer la main. C'est encore plus difficile dans les lieux de culte. C'est notre façon de faire. Mais je pense qu'avec le temps, les gens peuvent comprendre. »

Dans le centre-ville de Nairobi, la mosquée Jamia, la plus grande mosquée de la capitale kenyane, est fermée depuis mars. Le cheikh Ibrahim Lethome, responsable des affaires religieuses à Jamia, déclare que la fermeture des portes aux fidèles pour la première fois en 95 ans d'histoire de la mosquée a été bouleversante. « Beaucoup se sont effondrés et ont pleuré, moi y compris, mais nous avons dû prendre cette décision. »

Faire passer le message

Beaucoup de ces institutions fermées ont trouvé des moyens de joindre leurs fidèles, en proposant des services et relayant des informations sur la manière de se protéger contre le virus. L'une des plus anciennes églises de Nairobi, Christ Is the Answer Ministries (CITAM), diffuse des émissions de télévision, de radio et en ligne qui touchent environ 200 000 personnes le dimanche.

« Nous encourageons les gens à se laver les mains, à désinfecter, à garder leurs distances, à rester chez eux. De cette façon, nous sommes en mesure d'aider le gouvernement à atteindre son objectif d'arrêter la transmission du virus », déclare l'évêque David Oginde du CITAM.

Au Kenya, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) collabore avec des organisations religieuses par l'intermédiaire du ministère de la Santé pour renforcer la sensibilisation des communautés à l'éducation à la santé et à la sécurité concernant le COVID-19. En collaboration avec des experts de la santé, la communauté musulmane a établi des directives sur les enterrements sûrs.

« Nous encourageons et soutenons les efforts des communautés religieuses dans la lutte contre le coronavirus », a déclaré Dr Rudi Eggers, représentant de l'OMS au Kenya. « Nous travaillons avec leurs leaders car ce sont des acteurs majeurs qui ont des liens crédibles et une influence au sein des communautés. »

Préserver des vies

Les gouvernements à travers l'Afrique ont intensifié les mesures visant à endiguer la propagation du COVID-19. La surveillance et le dépistage de la maladie s'intensifient à mesure que le virus se propage au-delà des capitales vers les provinces et les régions. L'OMS a appelé les pays africains à décentraliser et à renforcer les mesures d'urgence au niveau sous-national pour lutter contre le virus.

Les déplacements et les rassemblements ayant été largement interrompus en raison de mesures de confinement strictes, l'imam Cissé en Côte d'Ivoire affirme que les prières au sein des familles ont été renforcées. « Étonnamment, nous constatons quelques bons résultats. Auparavant, il n'était pas facile de rassembler toute la famille pour des prières à la maison. Avec le COVID-19, tout le monde vient pour les prières à l'heure avec plusieurs membres de la famille présents. »

« Quand il y a une pandémie, elle concerne tout le monde. Nous devons en apprendre davantage sur cette maladie pour trouver les moyens de l'arrêter. »

Alors que les musulmans vont commencer à observer le mois sacré du Ramadan, l'OMS a publié des conseils de sécurité tels que la pratique de la distance physique, l'utilisation de salutations acceptées culturellement et religieusement qui évitent le contact physique tel que saluer en levant la main, hocher la tête ou placer la main sur le cœur. Les personnes qui ne sont pas en bonne santé ou qui présentent des symptômes du COVID-19 ou les personnes âgées ayant des problèmes de santé préexistants sont exhortées à éviter toute manifestation ou rassemblement.

« La préservation de la vie précède tout le reste », déclare le Cheikh Lethome.

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